Les Français ne sont pas doués en langues ? Voici des propositions concrètes pour changer d’état d’esprit

Contre l’idée reçue que les Français ne sont pas doués en langues des propositions concrètes pour changer d’état d’esprit

La croyance est solidement établie que les français sont « nuls en langues » et que la faute en est à l’enseignement dispensé en France.

Je me concentrerai sur l’anglais qui est le sujet qui m’intéresse tout particulièrement, même si je pense que la problématique est étendue à la pratique et l’enseignement des secondes langues en général.

Certes, le niveau stagne et d’après un article de cadre-emploi de novembre 2014, les Français étaient au dernier rang européen et au 29ème rang mondial [1]. Un chiffre bien plus bas selon l’étude EF-EPI [2] en 2015 où la France était au 37 rang sur 70 pays et en 2021, 31ème sur 122 pays.  

En 2017 [3], une étude sur les enfants de 3ème issue de la Depp (Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance), a annoncé enfin un progrès chez les ados. Je renvoie le lecteur à l’article pour avoir les détails justifiant cette annonce.

Toutes ces statistiques reflètent de très grandes disparités socio-professionnelles et régionales, villes-campagne, privé-public et par tranches d’âge.

Certes, le tableau n’est pas enthousiasmant mais il y a pourtant des forces vives à l’œuvre et l’excellent petit ouvrage sur « l’apprentissage des langues » de Stéphanie Roussel et Daniel Gaonac’h chez Mythes et Réalités désamorce bon nombre de clichés en développant des contre exemples et analysant plus finement les idées reçues en question. Je me concentrerai sur les 10 rubriques du sommaire. 1 – Il faut apprendre une langue étrangère le plus tôt possible ! 2 – les langues, on est doué ou pas ! 3 – Les français sont nuls en langues 4 – Avec le numérique on apprend mieux les langues, et de manière innovante 5 & 6 – Regarder des films et des séries en version originale est le meilleur moyen d’apprendre une langue / variante avec en version sous-titrée ; 7 -Le séjour à l’étranger est le meilleur moyen d’apprendre une langue étrangère 8 – l’enseignement d’un contenu disciplinaire en langue étrangère permet de « faire d’une pierre deux coups » 9 – Les neurosciences : une révolution pédagogique pour l’apprentissage des langues.

Tous ces 9 chapitres posent d’excellentes questions et il n’est pas question ici de résumer les 143 pages de l’ouvrage mais d’attirer l’attention sur le fait que l’idée du « doué pas doué » est une excuse commode pour ne pas s’attaquer à la question des stratégies d’apprentissage qui peuvent et doivent varier en fonction des individus.

Mettre le niveau bas sur le compte d’une propension « quasi-génétique » ou structurellement culturelle est une pirouette ; accuser les enseignants d’inefficacité et réclamer systématiquement des « natives » comme solution miracle est une insulte à la pédagogie des langues qui n’est pas une transfusion miracle d’un natif à un non natif. C’est du moins ma conviction.

Dans l’apprentissage d’une langue telle que l’anglais, le pourquoi (une fois de plus) de l’apprentissage est fondamental. C’est parce que la finalité du futur locuteur va conditionner le calibrage des efforts à fournir et le degré d’exigence. L’important à mon sens est d’avoir (voire de créer) les occasions de parler anglais pour des raisons motivantes. Vu l’usage massif qui est fait de l’anglais par le monde, il est très important de faire comprendre que cette langue offre une quantité impressionnante de possibilités à son utilisateur et que moyennant un investissement en temps, finance et volonté tout à fait raisonnables à niveau quotidien, le bénéfice peut être considérable.

Point n’est besoin de travailler dans une multinationale, l’anglais est partout. Je l’ai appelé le « New normal » et c’est à cette normalité là qu’il est important de s’adapter.

A l’extrême, j’ai eu des clients agriculteurs à la campagne qui se retrouvaient soudain perdus parce qu’ils ne pouvaient pas échanger directement avec des conjoints ou conjointes non francophones de leurs enfants, voire à ne pas pouvoir converser simplement avec leurs petits-enfants.

Une excellente vidéo de Marianna Pascal [4], coach en Indonésie, rompue à l’enseignement de l’anglais aux indonésiens, a posé le problème de l’aisance à l’oral en la reliant directement avec la précision de l’intention et l’effet laser d’une communication ciblée. Dire avec précision des choses simples. Là réside la clé ! et se méfier des ambitions trop élevées qui aboutissent malheureusement à ne créer que du découragement et de la frustration.

Lorsque ma regrettée mère enseignait l’anglais avec les méthodes « dernier-cri » dites audio-visuelles des années 1970, elle devait travailler avec des tableaux de feutrines, des figurines avec du scratch et d’énormes bandes magnétiques avec des dialogues pré-enregistrés. Sur le net, en libre accès aujourd’hui sont proposés des millions de contenus, des applications de traduction automatique, sous dictée, des innombrables coachs et écoles de langues en ligne, des propositions digitales pour tous niveaux pour apprendre. Nous sommes loin de ces infiniment modestes moyens d’il y a 50 ans. 

Je pense qu’avec les plateformes de diffusion en continu de programmes et films, le choix de l’audio en version originale et les sous-titres en version closed caption qui ne sont pas interprétatifs et sont quasiment des verbatims, il y a un formidable potentiel d’entraînement ludique, notamment pour des jeunes.

Cette manne babélienne peut être paradoxalement repoussante si l’on n’est pas guidé et le risque est de s’épuiser en suivant de fausses pistes ou en devenant la proie de toutes sortes de propositions aussi mirifiques que mensongères qui promettent de parler anglais en une semaine. Encore faut-il savoir de quoi on parle !

La bonne nouvelle est que les gens réputés pas « doués » pour les langues ont pourtant appris et apprennent toutes sortes de langages spécialisés dans toutes sortes de domaines professionnels de la finance, du marketing, du retail…etc. Bien sûr, il s’agit de langages « meta » qui articulent des concepts et ne sont pas une syntaxe, mais les mécanismes de mémorisation de vocabulaire, d’articulation entre concepts, de déclinaisons détaillées sont parfaitement maitrisés au bout de quelques semaines à quelques mois. 

Les jeunes parlent des langues « spéciales » qui signent leur appartenance à une communauté. Les régionalistes sont capables de manier des langues traditionnelles comme le Breton ou l’occitan, mais l’anglais est parfois vécu comme une langue « ennemie » parce que liée à une idéologie…

Pour la prononciation, les gens qui se disent incapables de distinguer des sons « étrangers » écoutent avec plaisir pourtant à longueur de journée des chansons et savent pratiquer le karaoke quand ils n’ont plus peur d’être ridicules. L’affranchissement des normes scolaires, la peur de l’erreur, le traumatisme de l’étiquetage « nul en anglais » sont des facteurs totalement bloquants.

Il existe plein de techniques comme le shadowing[5] par exemple qui consiste à choisir un locuteur dans un film et à parler en même temps que lui, comme un perroquet, jusqu’à recouvrir littéralement sa voix.

La liste des pratiques nouvelles est longue. Mais l’essentiel n’est pas dans la quantité des outils mais dans le maintien de l’énergie et de la confiance en la possibilité de réussir à prendre la parole. Pour cela il faut littéralement dynamiter les vieilles croyances, c’est probablement la partie la plus difficile mais une fois que le blocage est franchi, la gratification n’en est que plus grande.

Alors, non ! les Français ne sont pas nuls en langues. C’est de s’en convaincre qui est nul et injuste ! Et pour ceux qui se sentent encore désespérés…contactez-moi et on en parlera.    

[1] https://www.cadremploi.fr/editorial/formation/langues/detail/article/niveau-danglais-les-francais-derniers-du-classement-europeen.html

[2]  https://www.ef.com/wwen/epi/

[3] https://www.lefigaro.fr/langue-francaise/actu-des-mots/2017/09/30/37002-20170930ARTFIG00005-le-niveau-d-anglais-des-ados-s-ameliore.php

[4] Learning a language ? Speak it like you’re playing a video game/ Marianna Pascal / TEDxPenangRoad https://youtu.be/Ge7c7otG2mk

[5] https://www.freeed.com/articles/803/step-by-step-guide-to-the-shadowing-technique